Un livre en collaboration avec Laurent Baudoin et Isabelle Mérian

Lorsque le lecteur tournera la page 166, c’est-à-dire la dernière, il aura acquis à ce moment, s’il ne l’avait déjà, une certitude. La certitude que l’Etat d’Israël, malgré l’infâme énergie déployée par ses dirigeants, les méthodes et les moyens immondes utilisés par sa police et son armée, ne réussira jamais à rayer de la carte et du monde l’Etat de Palestine et le peuple palestinien.
Ce peuple, malgré tout ce qu’il subit au quotidien d’humiliations, d’injustices et de crimes impunis, ne baisse pas la tête, ne perd pas courage, se tient debout et résiste de toutes ses forces. C’est tout un peuple de Résistants face à « l’armée du crime ».

Ziad Medoukh nous apprend, grâce à son livre, que les habitants de Gaza ont choisi, en fonction du contexte particulièrement difficile de la Bande de Gaza, une forme adaptée de résistance : la résistance non-violente.
Cela ne signifie pas que les autres formes de résistance soient inutiles ou condamnables, pas du tout.
Mais cela nous apprend ou nous rappelle que la résistance non-violente est aussi une arme redoutable, particulièrement crainte par ceux contre lesquels elle s’applique légitimement.
Ziad Medoukh annonce d’entrée le propos : il veut « montrer le visage d’un Gaza qui réinvente la vie ».
Tout au long de son texte, il reste attentif au choix des mots, s’efforçant d’utiliser « des mots qui reflètent la réalité, qui ne sont pas inventés ou inutilement choquants ».
Il s’ensuit un texte clair, précis, pédagogique et surtout très vivant, s’appuyant sur des exemples concrets qui nous font passer, dans un va et vient continu, de l’écrit de la réflexion à l’écrit de témoignage, l’un nourrissant l’autre.
L’auteur a structuré son livre en trois chapitres.
Premier chapitre : Aperçu général de la résistance non-violente à Gaza.
Ici il explique la démarche de « la grande marche du retour » et cela permet de remettre les pendules à l’heure. En effet, à la lecture de ces lignes, chacun pourra voir combien la réalité a été déformée, notamment par nombre de médias français.
Il nous décrit ensuite les nombreuses initiatives très concrètes prises par le Département de Français de l’Université de Gaza où il enseigne et par le Centre de la Paix qu’il a contribué à créer et qu’il anime.
Le deuxième chapitre est fort justement intitulé : Innover et s’adapter.
Et cela dans trois domaines cruciaux : l’autonomie alimentaire, l’éducation et la culture.
Ne pas dépendre du bon vouloir d’Israël pour s’alimenter en produits frais, c’est le pari des habitants de Gaza. Et l’une des idées a été de créer, partout où c’est possible dans les villes, des jardins potagers familiaux ou partagés. Et ça marche.
De même, vendre à prix peu élevé permet aux plus démunis- et ils sont nombreux au vu du blocus économique imposé par Israël- d’avoir accès aux légumes frais, une des bases de l’alimentation à Gaza.
Une autre adaptation est l’organisation économique en petites coopératives familiales, souvent gérées par des femmes, ou encore le développement de techniques agricoles écologiques plus économes en eau et l’utilisation de l’énergie solaire.
Résister par l’éducation et la culture est le second point fort de cette adaptation.
L’éducation est « la lumière de la Palestine ».
Priorité absolue donc à l’Ecole mais aussi utilisation des meilleures technologies informatiques pour compenser le blocus qui empêche les échanges directs.
Les universitaires de Gaza ont une haute idée de leur mission. Ils ne sont pas seulement transmetteurs de savoirs mais ont également un rôle social , politique et patriotique. Cependant la situation s’est dégradée et devient difficile. Le Centre de la Paix créé en 2004 joue ici un rôle d’importance.

La culture est aussi un combat du quotidien. Face aux tentatives ou aux destructions de leur culture, les Palestiniens font face ; ils innovent et s ‘adaptent, exemples à l’appui.
Israël a détruit le grand centre culturel El -Mishal. Mais les Palestiniens ont investi d’autres lieux et sont même revenus sur le site pour défier Israël.
Le troisième et dernier chapitre est consacré à « La part des femmes ».
On ne peut comprendre la société dans la Bande de Gaza si on ne s’intéresse pas « au rôle actif qu’y jouent les femmes, et particulièrement dans le vaste mouvement de résistance non-violente qui s’exprime actuellement ».
Rappelons que plus de 800 femmes se sont retrouvées veuves après l’agression israélienne de 2014.
24 000 jeunes filles et 23 000 femmes adultes sont toujours déplacées en raison de la destruction de leurs maisons.
Malgré cela, les femmes, toutes générations confondues, participent activement aux différentes formes de résistance et sont de plus en plus impliquées dans la marche de la société à Gaza. L’auteur nous présente plusieurs exemples concrets.
Et la conclusion de Ziad Medoukh pourrait se résumer à ces mots :
« Gaza , une ville enfermée mais une ville qui impressionne ».
Un témoignage à lire absolument. Il nous éclaire sur la vitalité et le courage de la population de Gaza. Il donne aussi courage et espoir à celles et ceux qui le lisent.
Les propos sont souvent illustrés de poèmes de Ziad Medoukh, poète francophone qui défend avec honneur la langue française.
Jean Alesandri
Etre non-violent à Gaza – Ziad Medoukh – Editions Culture et Paix
Ouvrage qui peut être commandé auprès de Laurent Baudoin ( baudoin-laurent@wanadoo.fr), au prix unitaire de 17 euro, frais de port compris.